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Eleveurs-tâcherons : quesaco ?

 

 

La réflexion de base sur l’implication des éleveurs dans les abattoirs, qu’il s’agisse de création ou de reprise d’outils, porte sur la gouvernance des structures d’exploitation, c’est-à-dire faire en sorte que les décisions stratégiques soient prises par les éleveurs, dans l’intérêt des éleveurs.

 

Mais l’implication ne peut pas s’arrêter là : l’étape suivant la maîtrise de la gouvernance réside dans la prise en charge de l’opérationnel à travers des éleveurs qui viennent faire le travail d’abattage au sein des abattoirs. Ils ont alors un statut de tâcheron.

Le tâcheronnage d’éleveurs est le stade ultime de prise en main de l’abattage par les éleveurs.

 

Mais personne ne fait cela pour le seul plaisir d’ajouter une corde à son arc, ou plutôt d’empiler un nouveau métier à ceux que l’éleveur qui commercialise lui-même sa viande accumule déjà (éleveur, commercial, livreur …).

 

Le tâcheronnage d’éleveurs vient accompagner la gouvernance d’éleveurs afin de changer le modèle économique de l’abattage et permettre ainsi aux éleveurs-gouvernants de ne pas être dans l’obligation de reproduire le modèle habituel des abattoirs qui est fait de salariat, de tonnage, de cadence et de prestations au rabais.

Gouvernance d’éleveurs et tâcheronnage d’éleveurs sont les deux conditions qui offrent la possibilité de faire fonctionner des outils d’abattage hors des critères habituels, c’est-à-dire sans courir après toujours plus de tonnage, en mettant à part égales la bientraitance des animaux et les conditions de travail des opérateurs, et tout en respectant à la lettre les règles sanitaires du métier.

 

Les principes du tâcheronnage

  • Un tâcheron n’a pas de lien de subordination, ce qui convient bien à une organisation collective du travail, dans laquelle on privilégie la responsabilité collective ;

 

  • Il est propriétaire de son matériel de travail (couteaux …)
     

  • Il n’est pas soumis à des horaires ou des jours définis de travail, ce qui veut surtout dire que cela ne lui est pas opposable. L’organisation collective du travail fait que chacun ne va pas travailler quand il veut …
     

  • Il est surtout rémunéré à la tâche, et, en abattoir, cela veut dire que pour l’abattage d’un animal, une somme est réservée à la rémunération des tâcherons et ceux-ci se la partagent.

Ce dernier point est essentiel car c’est lui qui porte le changement de modèle économique. En effet, pour l’entreprise, la charge financière liée au personnel est proportionnelle au nombre d’animaux abattus. Elle n’est plus dépendante du nombre de salariés ni de leur rythme de travail.

Cette charge passe ainsi du statut de charge fixe à un statut de charge variable.

 

 

Le meilleur exemple de l’efficacité économique de ce système se trouve dans l’observation des abattoirs qui ont fait faillite et ont été repris en mettant en place le tâcheronnage d’éleveurs.
 

On constate dans tous les cas que l’équilibre économique est obtenu alors que l’activité se situe bien en dessous des seuils de rentabilité précédemment admis.

 

 

Quel statut pour les éleveurs-tâcherons ?

En règle générale les éleveurs disposent d’un statut agricole et dépendent donc de la MSA.

L’activité professionnelle « d’abattage » n’est pas considérée comme ayant un caractère agricole.

Cependant, lorsqu’il s’agit pour un chef d’exploitation, d’une activité effectuée dans le prolongement de l’acte de production, la MSA estime qu’elle a un caractère agricole.
L’abattage étant bien le prolongement de l’activité d’élevage, la MSA considère qu’un éleveur qui va pratiquer l’abattage dans un abattoir poursuit son activité d’éleveur, même s’il ne participe à l’abattage d’autres animaux que les siens.
L’éleveur est ainsi couvert par la MSA lorsqu’il est présent à l’abattoir. Cette couverture vaut également pour les membres de sa famille et les salariés de son exploitation.

Pour ceux qui ne relèvent pas de la MSA, des solutions sont possibles à travers les statuts de travailleur indépendant ou d’auto-entrepreneur.
 

Quelques autres avantages du tâcheronnage

  • La gestion de la souffrance animale au moment de l’abattage est largement améliorée car un éleveur a une conscience aigüe de cette question. Il en assume la responsabilité devant ses collègues éleveurs ;

 

  • Inversement, les éleveurs qui ne participent pas à l’abattage accordent une grande confiance à ceux qui prennent en charge leurs animaux. Ils leur sont redevables ;
     

  • Le travail est déconnecté du temps, ce qui est la pratique quotidienne des paysans. La cadence d’abattage n’est plus un critère ;
     

  • La mixité est très fréquente sur la chaîne d’abattage, et ce n’est pas pour faire de la figuration, ce qui est plutôt nouveau dans ce métier. Cela conduit à des ambiances de travail différentes, plus respectueuses.
     

  • L’abattoir devient un lieu de rencontre et d’échanges entre éleveurs.

 

 

« C’est vrai que l’abattage nous colle un boulot de plus … Mais, si nous ne nous en occupons pas, rien ne changera » O. B.
 

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